Reham Abazid ne parlait pas anglais quand elle et sa famille sont arrivées au Canada en tant que réfugiés il y a cinq ans, après avoir quitté leur pays ravagé par la guerre, la Syrie. Elle ne connaissait pratiquement rien du pays où elle espérait bientôt se sentir chez elle.

Reham passait trois heures par jour à apprendre l’anglais au YMCA près de chez elle, à Saint John (N.-B.), mais ce n’était pas suffisant. Elle se disait que si seulement elle pouvait s’immerger dans la culture et s’habituer à entendre parler les personnes du coin, elle pourrait s’adapter plus vite et commencer à se sentir chez elle dans son nouvel environnement.

Elle voulait apprendre à mieux connaître les Canadiens. Où est-elle allée selon vous? Chez Tim Hortons, bien sûr!

« Je savais que les restaurants Tim Hortons étaient très populaires et que les Canadiens aimaient y passer leur temps libre », se souvient Reham.

« Dès que j’avais quelques heures, je prenais un crayon et du papier et j’allais m’asseoir au Tim Hortons. Je prenais des tas de notes sur ce que les gens disaient. Si j’entendais un mot que je ne connaissais pas, je le notais, et quand je rentrais chez moi, je le tapais dans Google Translate pour savoir ce que ça voulait dire.

Je passais tout mon temps libre au Tim Hortons. »

Chaque jour pendant des heures, Reham écoutait attentivement les conversations autour d’elle en grignotant un beigne ou en sirotant un vanille française ou un cappuccino glacé. Le personnel amical lui servait souvent du café chaud.

Elle se rappelle surtout avoir entendu des conversations sur la météo. Mais elle a aussi remarqué que souvent, les gens de son nouveau quartier semblaient sincèrement s’intéresser au bien-être et à la vie des personnes avec lesquelles ils conversaient.

C’est comme ça qu’elle a découvert tout le soutien qu’elle pouvait trouver au sein de sa nouvelle communauté.

Une paix troublante

Reham repense parfois à la simplicité de la vie qu’elle menait dans sa ville natale de Daraa, en Syrie. Elle et son mari avaient une jeune famille, une situation d’emploi stable et un citronnier dans leur cour.

Puis, en 2011, Daraa est devenu le centre de protestations après l’arrestation et la torture d’un groupe de jeunes du quartier. La situation a vite dégénéré. Le gouvernement a pris des mesures de répression, puis une guerre civile sanglante a éclaté.

Du jour au lendemain, la vie simple de Reham s’est envolée, et la survie de sa famille est devenue sa priorité.

« Il y avait des bombes qui explosaient partout. Je n’ai jamais eu peur pour moi-même, mais j’étais terrifiée pour mes enfants. »

La famille de Reham a fui vers le pays voisin, la Jordanie, mais la vie là-bas était aussi difficile. N’étant pas citoyens, les enfants de Reham ne pouvaient pas aller à l’école, et son mari ne pouvait pas travailler.

Lorsque la famille de Reham a finalement reçu l’appel des Nations Unies lui annonçant qu’elle pouvait émigrer au Canada, elle a senti qu’on leur offrait un nouveau départ.

« On s’est dit qu’on était la plus chanceuse des familles. Enfin, on pourrait assurer un avenir à nos enfants. »

Bâtir une nouvelle vie

Cinq ans se sont écoulés depuis son arrivée au Canada, et Reham ne pourrait être plus heureuse de la façon dont les choses se sont passées.

Son mari a trouvé un emploi stable en tant que mécanicien, et la famille a depuis accueilli un autre enfant.

Lorsque sa famille a fui la Syrie, Reham a emporté les clés de sa maison. Elle a toujours pensé que sa famille finirait par trouver un moyen de rentrer chez elle. Mais la famille a trouvé sa place au Canada, à l’autre bout du monde.

« Je suis chez moi à Saint John », déclare-t-elle. Les gens sont si chaleureux ici. Ils me font aimer chaque jour encore plus mon nouveau chez moi. Je les adore! »

Aujourd’hui, Reham nourrit des ambitions entrepreneuriales. Elle espère ouvrir son propre dépanneur et ancrer encore plus sa famille dans la communauté qu’elle a appris à aimer.

Quelques années seulement après ses « leçons » chez Tim Hortons, elle parle couramment l’anglais, et elle vient encore souvent prendre un café et un croissant. Quand Reham tente de décrire ce qu’elle ressent pour son pays d’adoption, les mots lui manquent, et c’est une chose rare pour elle aujourd’hui.

« J’aimerais avoir un mot pour exprimer à quel point je suis heureuse ici. »